Nous étions trois, chacun dans sa tête imaginait qu’il allait pouvoir passer un grand moment avec la famille et lui apporter, outre bien sûr toute la chaleur humaine de ceux qui pensent à eux et les soutiennent, tous les objets de chaque jour qui lui fait défaut depuis leur arrestation et leur mise en rétention.
Oui nous avons rencontré Vrej, Narine, Edo et Hassan, après avoir dûment remis nos cartes d’identité et déposé toutes les petites affaires personnelles nous appartenant, être passés au détecteur de métaux, nous avons eu l’autorisation d’une visite de 20 minutes dans un parloir fermé, surveillés par un policier de la PAF. Quant aux nombreux sacs contenant tous les vêtements, jeux des enfants, photos, vivement souhaités par toute la famille nous avons cru un instant que nous allions devoir repartir avec. Interdiction de rentrer dans l’enceinte du centre avec le véhicule pour le décharger, grande réticence quant aux contenants : s’il s’agit de cartons c’est non, de sacs qui ferment à la rigueur « il faut prévoir le départ et si les affaires sont dans des valises c’est mieux ….. » Non pour la nourriture que l’on nous a gentiment demandé de reprendre. Tout a été fouillé, sera remis dans la bagagerie et Narine ou Vrej pourra demander au fur et à mesure de ses besoins d’aller chercher ce qui lui manque.
En 20 minutes nous avons essayé de démêler ce qui se passe : demain Vrej doit aller en avion à Paris au consulat arménien et revenir le soir même, pourquoi ? vérifier s’il « existe » réellement dans ce pays ? forcer l’obtention d’un visa ? Nous nous trouvons dans la première période de quinze jours pendant laquelle la préfecture « organise » le retour vers le pays d’origine. Seul le Préfet de l’Ardèche peut revenir sur cette décision de les renvoyer vers le pays qui n’a pas su leur garantir la sécurité et le désir d’y vivre. La CIMADE cherche tous les moyens qui permettraient d’infléchir cette décision : protection de l’enfance .. ? C’est une course contre la montre. Tous ceux que notre réseau RESF : Maire de Tournon, Députés, Conseiller Général a pu convaincre d’intervenir l’ont fait , les anonymes sensibles à ce drame l’ont fait également, lettres au Préfet, pétitions … A ce jour c’est le silence total du côté de Monsieur le Préfet.
Que dire alors à cette famille moralement et physiquement complètement épuisée ? Comment les convaincre que nous faisons tout ce qui est en notre maigre pouvoir.
Nous avons bavardé pourtant, nous avons même essayé de faire sourire les deux enfants, d’une pâleur impressionnante : ils ne veulent pas manger, ils dorment très mal et puis nous sommes partis.
Difficile de retenir nos larmes devant eux, difficile de se parler lorsque nous sommes remontés en voiture. Alors oui un centre de rétention est une prison, alors oui c’est une honte d’enfermer des enfants dans une prison, alors oui c’est une honte de bafouer ainsi les droits de l’homme et ceux des enfants alors oui nous ne sommes plus en France une terre d’asile pour ceux qui n’ont plus chez eux la sécurité.
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